Pourquoi prend-on la décision de renouveler son smartphone ? Qu’est-ce qui nous fait percevoir celui-ci comme étant devenu obsolète ? Le travail récent d'un mémoire de recherche interroge le rôle de l’obsolescence logicielle dans le renouvellement des smartphones. Dans ce travail, elle cherche à comprendre les usages de ces terminaux et les facteurs qui poussent les usagers à considérer ceux-ci comme obsolètes et devant être remplacés.
Dans l’écosystème numérique français, l’impact environnemental est largement dominé par les appareils eux-mêmes, représentant près de 79% de l’empreinte carbone totale. Cette empreinte est principalement due à leur processus de fabrication, bien plus que leur utilisation quotidienne. La production de ces dispositifs entraîne une série de conséquences écologiques et sociales graves, telles que l’extraction de métaux de plus en plus rares, la pollution des eaux et des sols, la dégradation de la biodiversité, et des pratiques de travail qui foulent aux pieds les droits fondamentaux de l’homme.
Les smartphones se posent comme les icônes de cette réalité numérique, illustrant parfaitement l’empreinte écologique du secteur. Bien qu’ils soient conçus pour être économes en énergie, leur cycle de renouvellement est étonnamment court. En 2019, la durée de vie moyenne d’un smartphone en Europe de l’Ouest était estimée à seulement trois ans et demi. La conception actuelle de ces appareils favorise leur remplacement rapide, que ce soit à travers leur manque de réparabilité, l’introduction régulière de nouvelles fonctionnalités, ou des stratégies commerciales agressives. Parmi les causes de ce renouvellement fréquent, les dommages physiques (comme les écrans brisés ou les batteries défaillantes) ne sont pas les seuls coupables. Un aspect moins visible mais tout aussi crucial est l’obsolescence logicielle, souvent réduite aux seules mises à jour et considérée sous un angle purement technique.
Ce mémoire de recherche explore en profondeur les implications de l’obsolescence, notamment sur les smartphones, du point de vue des consommateurs. Si l’obsolescence présente des défis significatifs pour les consommateurs, notamment en termes de coûts et de durabilité, elle stimule également des comportements et des innovations favorisant la prolongation de la vie des appareils. Cette dynamique souligne l’importance d’une approche équilibrée, prenant en compte à la fois les besoins des consommateurs et les impératifs écologiques. Dans le cadre de l’obsolescence, en particulier pour les smartphones, plusieurs innovations et initiatives cherchent à allonger la durée de vie des appareils, réduire les impacts environnementaux et répondre aux besoins des consommateurs plus conscients de ces enjeux.
Les innovations
- Smartphones modulaires : Des projets comme Fairphone proposent des smartphones modulaires, où les composants tels que la batterie, l’écran, et même certains modules internes peuvent être facilement remplacés par l’utilisateur. Cela permet de prolonger la durée de vie de l’appareil en remplaçant uniquement les parties défectueuses ou obsolètes.
- Programmes de mise à jour étendus : Certaines marques s’engagent à fournir des mises à jour logicielles pour leurs appareils sur une période plus longue que la moyenne. Par exemple, Samsung, Google, HMD ont annoncé des politiques de mise à jour de sécurité et de système d’exploitation sur plusieurs années pour garantir que les appareils restent sécurisés et fonctionnels plus longtemps.
- Écosystèmes et stores alternatifs : Des initiatives telles que /e/ Foundation offrent des systèmes d’exploitation et des boutiques d’applications alternatifs, qui sont moins gourmands en ressources et qui supportent les anciens appareils plus longtemps que les systèmes officiels.
- Initiatives de réparation : La montée en puissance des Repair Cafés et des ateliers de réparation, où les consommateurs peuvent apprendre à réparer leurs appareils avec l’aide d’experts, contribue à la réduction de l’obsolescence en encourageant la réparation plutôt que le remplacement.
- Normes de réparabilité : Dans certaines régions, comme l’Union européenne, des initiatives législatives visent à imposer des normes de réparabilité aux fabricants d’électronique, les obligeant à concevoir des produits plus faciles à réparer et à fournir des pièces détachées pendant une période minimum après la fin de la production.
- Recyclage et économie circulaire : Des efforts pour améliorer le recyclage des smartphones et encourager une économie circulaire sont également en cours. Ces initiatives visent à réutiliser les matériaux récupérés des anciens appareils pour la production de nouveaux, réduisant ainsi les besoins en ressources vierges.
- Logiciels de prolongement : Le développement de logiciels conçus pour prolonger la vie des appareils, comme les systèmes d’exploitation légers ou les applications qui optimisent les performances des vieux smartphones, constituent une autre innovation importante dans la lutte contre l’obsolescence.
Points positifs et négatifs identifiés
Points négatifs pour le consommateur
- L’obsolescence, tant logicielle que matérielle, pousse au renouvellement fréquent des appareils. Cela est en partie dû au modèle économique des constructeurs basé sur la sortie continue de nouveaux produits, rendant les anciens modèles désuets.
- La gestion du stockage devient un défi, avec des systèmes et des applications qui occupent de plus en plus d’espace, nécessitant soit un ménage régulier, soit le renouvellement du téléphone.
- L’incompatibilité des anciens appareils avec les mises à jour d’applications essentielles peut limiter l’accès à certains services, créant une pression pour acquérir un nouveau smartphone.
- Les dysfonctionnements et la baisse de performances avec le temps détériorent l’expérience utilisateur, poussant à la consommation de nouveaux modèles.
- Le renouvellement fréquent engendre des dépenses substantielles pour les consommateurs, en plus de contribuer à une consommation accrue de ressources.
Points positifs pour le consommateur
- Les consommateurs adoptent diverses stratégies pour prolonger la durée de vie de leurs smartphones, telles que la réparation, le nettoyage régulier du stockage, ou encore l’utilisation de logiciels alternatifs.
- La prise de conscience des impacts environnementaux du renouvellement fréquent des smartphones encourage certains consommateurs à opter pour des pratiques plus durables.
- L’information et l’éducation sur la gestion des problèmes logiciels et matériels permettent aux utilisateurs de prendre en main la durée de vie de leur appareil, réduisant la dépendance aux cycles de renouvellement.
- L’intérêt croissant pour la réparabilité des smartphones pousse à l’innovation et à la disponibilité de solutions de réparation, bénéficiant à la fois à l’environnement et aux consommateurs.