Publié le 9 mars 2022, modifié le 14 mars 2022.
Par La Rédaction

Le smartphone et les applications au cœur de la guerre en Ukraine

Publié le 9 mars 2022, modifié le 14 mars 2022.
Par La Rédaction
Tamari Putgaradze, 29 ans, qui a fui son Kharkiv natal avec sa mère, utilise son téléphone portable alors qu'elle s'accroupit à côté d'une prise électrique sur le sol dans un abri temporaire installé dans un ancien centre commercial, à Przemysl, en Pologne, le 3 mars 2022. Sean Gallup/Getty Images

Tamari Putgaradze, 29 ans, qui a fui son Kharkiv natal avec sa mère, utilise son téléphone portable alors qu'elle s'accroupit à côté d'une prise électrique sur le sol dans un abri temporaire installé dans un ancien centre commercial, à Przemysl, en Pologne, le 3 mars 2022. Sean Gallup/Getty Images

Exploiter les technologies numériques pour faire la guerre, témoigner, documenter l'horreur, exprimer son impuissance... se fait aussi sur mobile. Les crises, en particulier, peuvent stimuler le processus de numérisation.

L’écosystème de l’industrie du mobile est plein de paradoxes ! Depuis pratiquement le départ, le mobile est un formidable vecteur d’espoir, il peut même sauver des vies ou témoigner contre des brutalités, être une immense lueur de partage, d’échange et pousser à faire une belle action. Même si celle-ci est ridicule, elle aura eu le temps d’unir un court instant les hommes et femmes autour d’une cause pas toujours perdue. Mais c’est aussi une véritable arme qui fait souvent beaucoup de dégâts, très souvent amplifiée par la dimension sociale qui diffuse en une étincelle vidéo, texte et audio à travers la planète, voire dans une communauté. Le mobile peut aussi dénoncer des idées, des actions, des images. Mais l’inverse est vrai aussi, le mobile avec sa cohorte de services peut montrer l’horreur et propager des rumeurs par SMS, des idées cruelles appuyées par des images parfois insoutenables ! Nous avions il y a plusieurs années de suite écrit des rétrospectives “Le Smartphone de tous les dangers et de l’espoir ! rétrospective 2014

Un récent article sur la diplomatie numérique montre que les technologies sont depuis longtemps utilisées par les états pour atteindre un objectif concret de politique étrangère. Le printemps arabe a conduit à l’adoption massive des médias sociaux, les diplomates espéraient communiquer directement avec les publics étrangers. La pandémie de Covid-19 a vu les diplomates adopter Zoom et les réunions virtuelles qui ont remplacé les réunions en face à face. Un jour après l’invasion, le gouvernement ukrainien a appelé des volontaires à rejoindre son armée informatique. Des cyberspécialistes, des développeurs et des hackers ont été invités à aider l’Ukraine à mener des offensives informatiques et cybernétiques contre la Russie et son allié la Biélorussie.

Le smartphone et les applications sont aux cœurs des stratégies, d’ailleurs Mykhailo Fedorov, vice-Premier ministre ukrainien et ministre de la transformation numérique, a tweeté rapidement qu’un “blocage complet” de l’App Store d’Apple et des services Google Play de Google serait le bienvenu. Tant que l’infrastructure de communication n’est pas démantelée, les smartphones donneront un avantage aux combattants ukrainiens. Cependant, les forces russes pourraient être en mesure d’utiliser les signaux des téléphones portables pour retrouver des mouvements.

Très vite, les applications comme Google Maps ont été la cible comme des outils de renseignement. Google a très vite désactivé plusieurs outils cartographiques en Ukraine qui avaient été utilisés pour suivre les mouvements des troupes et des civils lors de l’invasion russe. La fonction de trafic en direct de Google Maps, qui signale les embouteillages et d’autres conditions routières en fonction des données de vitesse et de localisation des téléphones des utilisateurs, pourrait être utilisée par les autorités russes et ukrainiennes pour suivre les mouvements de chacun, selon les experts.

Une autre application qui, cette fois, est la cible de la Russie, l’application mobile Zello qu’elle prévoyait de bloquer visant à imposer des restrictions sur la circulation de l’information à l’intérieur du pays après l’invasion de l’Ukraine par la Russie. L’application de la société d’Austin, au Texas, permet aux utilisateurs d’utiliser leur téléphone comme un talkie-walkie pour parler directement avec d’autres utilisateurs. Les utilisateurs peuvent également rejoindre des canaux pour communiquer.

Un autre usage, c’est Reface, développée en Ukraine, qui a ajouté des notifications push informant sa base d’utilisateurs mondiale d’environ 200 millions de personnes de l’invasion du pays par la Russie. Toutes les vidéos créées dans l’application sont désormais filigranées avec le drapeau ukrainien et le hashtag #StandWithUkraine. La startup a lancé la campagne anti-guerre au tout début, elle indique que 9 millions de messages ont été envoyés, dont 2 millions aux utilisateurs en Russie dans les premiers jours.

Telegram

Les Russes et les Ukrainiens sont tous deux des utilisateurs prolifiques de Telegram. Ils s’appuient sur l’application pour les canaux qui agissent comme des flux d’actualités, des discussions de groupe (publiques et privées) et des communications individuelles. Depuis l’invasion russe de l’Ukraine, Telegram est resté une bouée de sauvetage importante pour les Russes et les Ukrainiens, comme un moyen de se tenir au courant des dernières nouvelles et de rester en contact avec leurs proches.

L’armée informatique est gérée via un canal Telegram suivi par 180 000 utilisateurs. C’est peut-être le plus démonstratif de la façon dont les nations improvisent pendant une crise en utilisant les médias sociaux pour assembler la toute première armée informatique officielle et volontaire. L’outil de messagerie Telegram est devenu l’une des applications au cœur de la guerre en Ukraine. Quelques jours seulement après l’invasion de la Russie, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a envoyé un message sur Telegram depuis la capitale Kiev où il a appelé ses compatriotes à résister à l’attaque russe.

Dans le même temps, de nombreuses personnes en Russie utilisent l’application pour accéder aux nouvelles et aux conversations sur l’Ukraine qui ne sont pas la version des événements sanctionnée par l’État. L’application permet de suivre des sites Web d’actualités et de s’abonner à des newsletters pour obtenir des informations en dehors des médias contrôlés par l’État, ce qui en fait une bouée de sauvetage pour les Ukrainiens et les Russes. Telegram a la réputation d’être une application de messagerie sécurisée, mais les utilisateurs doivent tout de même faire attention. La plate-forme n’a pas de chiffrement de bout en bout par défaut. Le chiffrement de bout en bout signifie qu’une plate-forme ne peut pas connaître le contenu des messages des utilisateurs. Vous pouvez cependant opter pour le chiffrement de bout en bout, mais uniquement pour les discussions en tête-à-tête et non pour les messages de groupe.

WhatsApp & Instagram

Will Cathcart, le responsable de WhatsApp, a déclaré sur Twitter que les services d’urgence ukrainiens avaient lancé une ligne d’assistance téléphonique pour fournir aux gens des informations de qualité sur la situation. Sur WhatsApp, il y a un chiffrement de bout en bout activé par défaut.

Les utilisateurs adultes d’Instagram, en Ukraine et en Russie, seront également alertés de l’option au moyen d’une notification qui apparaît en haut de leur boîte de réception de messages directs, qui les informe qu’ils peuvent passer à une conversation chiffrée s’ils le souhaitent. Pour les utilisateurs finaux, les changements ne se limitent pas aux DM Instagram cryptés. La société a également déployé des fonctionnalités de sécurité pour les utilisateurs en Ukraine et en Russie, notamment la possibilité pour les utilisateurs de verrouiller leur profil Facebook et de supprimer la possibilité d’afficher et de rechercher des listes d’amis,

Smartphone

Depuis longtemps, la caméra témoigne et documente des événements y compris en tant de guerres, cela va du grand reporter qui saisit des moments de vie aux vidéos meurtrières prises par la population pour alerter. Mais c’est aussi, aujourd’hui, des policiers à Moscou qui arrêtent des gens et exigent de voir leurs téléphones.

Les mobiles sont aussi le lien entre les populations et les familles, l’application TikTok a permis aux Ukrainiens de capturer leur vie quotidienne, mais ils commencent à être noyés par le flux incessant. TikTok est un moyen d’ouvrir une fenêtre sur la réalité sur le terrain à laquelle l’Ukraine est maintenant confrontée. Au cours des dernières semaines, TikTok est devenu une app essentielle pour les personnes à la recherche d’informations sur la guerre, offrant un aperçu des lignes de front des grandes villes ainsi que de la vie quotidienne en Ukraine. Par exemple, Umney, 28 ans, a documenté son voyage de retour en Ukraine sur TikTok, où il a depuis accumulé plus de 200 000 abonnés TikTok. Il a continué à publier des mises à jour de l’Ukraine à son public alors que la guerre s’intensifiait.

Les médias comme la BBC, Voice of America et Radio Free Europe/Radio Liberty (RFE/RL) ont été bloqués par le Kremlin, ainsi que plusieurs sites ukrainiens, Twitter et Facebook. La BBC a publié des instructions sur la façon de contourner le black-out des médias en accédant au contenu de la BBC via deux applications : Psiphon, un VPN en open source, et Tor, un navigateur anonyme.

Une conséquence plutôt dingue provient d’une application de rencontres. Le Sun a récemment rapporté que lorsque des soldats russes entraient dans des zones peuplées d’Ukraine, leurs applications mobiles Tinder faisaient les matchs de rencontres éligibles dans la région. L’application mobile Diia permet aux Ukrainiens de faire don de subventions gouvernementales pour les vaccinations Covid-19 maintenant à destination de l’armée à la place.

Nous aimerions nous réveiller de ce cauchemar !

Lire aussi