Publié le 2 novembre 2020, modifié le 2 novembre 2020.
Par Christophe Romei

Vive la librairie digitale !

Publié le 2 novembre 2020, modifié le 2 novembre 2020.
Par Christophe Romei
Creation : servicesmobiles - Photo : servicesmobiles - Jonas Jacobsson/Unsplash

Creation : servicesmobiles - Photo : servicesmobiles - Jonas Jacobsson/Unsplash

Rien ne sera plus comme avant, il faut apprendre, s'adapter, inventer, le digital est l'une des clés de la solution.

Lire un livre en papier est un choix, avoir une bibliothèque dans un salon est aussi un choix qui incombe à chacun. En tout cas, cette profession et industrie du livre comme celle des Taxis n’a pas pris la mesure du digital depuis les années 2000 et encore moins depuis le départ de la pandémie, rien ne sera plus comme avant, il faut apprendre, s’adapter et inventer ! Il faut organiser les magasins physiques avec des plateformes de e-commerce et de livraison en attendant de meilleurs jours. Facile à dire, pas facile à faire en quelques mois (que de temps perdu depuis Mars)… mais les moyens sont présents :

L’industrie du livre représente plus de 100 000 personnes employées en France, avec un chiffre d’affaires global de 6,4 milliards €. En outre, 87 % des Français ont accès à la lecture via le réseau des bibliothèques publiques. 3 300 librairies en France, soit l’un des réseaux les plus denses au monde. Grâce à la loi Lang de 1981 sur le prix unique du livre, la librairie fait partie de l’exception culturelle française.

Quelques chiffres sur les librairies indépendantes en France :

  • Les librairies, premier circuit de vente de livres en France. Elles représentent 40% du marché devant les grandes surfaces culturelles, la grande distribution alimentaire, etc.
  • Profil type d’une librairie : CA : 600 000 euros, 4 emplois, Rentabilité : 1%, soit 6 000 euros.
  • En tout cas, en cette période de pandémie mondiale qui touche le digital, c’est une excellente piste pour ne pas attraper un virus qui se balade, y compris sur toutes les surfaces pendant quelques heures, le papier et le carton.
  • Nombre de titres publiés : 2017 : 68 200 titres sont publiés pour 523 millions d’exemplaires imprimés.
  • Nombres d’exemplaires vendus en 2018 : 430 millions d’exemplaires. 749 000 références commercialisées.

Retour sur Amazon

Pourquoi parler d’Amazon l’un des concurrents directs des librairies ? Parce que le géant a vécu aussi un chamboulement majeur, non pas une pandémie, un changement d’usage et un krach boursier !

En 2004, Jeff Bezos et les équipes d’Amazon vont développer le Kindle. C’était la première incursion d’Amazon dans le matériel. La deuxième activité d’Amazon a été décimée lorsque Apple a numérisé l’industrie de la musique. Les ventes de CD avaient été importantes pour Amazon, mais elles étaient éclipsées par les ventes de livres. Jeff Bezos a appris les leçons de l’iPod et d’iTunes et les a appliquées au Kindle. L’activité principale de vente au détail d’Amazon a été ébranlée après le clash Internet (2001/2002). En 2004 a été créée l’équipe Kindle (la même année a été créée l’équipe AWS). Tout le monde a dit que c’était une “distraction”, Jeff Bezos les a ignorés, il faut apprendre et s’adapter.

Steve Kessel dirigeait l’activité média d’Amazon en 2004 (livres / musique / DVD). Les livres à eux seuls ont généré plus de 50% des flux de trésorerie d’Amazon. Jeff Bezos l’a réaffecté pour construire le Kindle. Sa nouvelle mission, détruire son ancienne “entreprise”. Ne supposez pas que quelque chose ne peut être fait, simplement parce que d’autres ont essayé et échoué. À l’époque, 2 startups avaient déjà échoué avec les lecteurs de livres électroniques. Sony avait un lecteur sur le marché qui n’obtenait aucune traction. Ces échecs ont encouragé la détermination le fondateur d’Amazon.

Les lecteurs de livres électroniques qui ne démarrent pas avaient utilisé des écrans LED, Amazon a adopté l’encre électronique (première utilisation commerciale). Les iPod utilisaient des câbles pour se synchroniser, Amazon a utilisé le WiFi et le cellulaire. La synchronisation via WiFi sans câble était innovante et leur équipe en était fière. Mais Jeff Bezos ne pensait pas que c’était assez magique. Il a insisté sur la synchronisation par la data cellulaire et il ne voulait pas facturer le client pour les données. Nous lui avons dit que cela ne pouvait pas être fait, il l’a fait quand même. Ils ont ajouté aussi un clavier pour la recherche (c’était une erreur, mais ça valait le coup d’essayer). Amazon a inventé une nouvelle façon de numériser des livres.

Jeff Bezos souhaitait 100 000 livres en magasin au lancement pour 9,99$ chacun. Selon Dan Rose, cela semblait impossible. Les éditeurs bataillaient entre la peur et l’indifférence. Les rendez-vous se sont succédé, les plus difficiles de sa carrière.

La construction du matériel a été difficile. Chaque plate-forme logicielle/Internet construit éventuellement du matériel. Et ils apprennent la même leçon à chaque fois, c’est beaucoup plus difficile que de créer un logiciel. Des cycles d’itération lents, atomes vs bits, etc. La seule façon d’apprendre est d’expédier aux clients le produit fini. Il a fallu 3,5 ans pour expédier le premier Kindle.

Marché du ebook

En raison de la pandémie mondiale, il y a eu une demande accrue de lecteurs numériques et de notes électroniques. Hisense, iFlytek, iReader, Kobo, Onyx Boox et une myriade d’autres fournisseurs ont sorti un tas de nouveaux appareils tout au long de l’année. E Ink, qui fournit la technologie, vient d’annoncer que son chiffre d’affaires 2020 sera le plus élevé en 4 ans, et ce sans qu’Amazon ne publie un nouveau Kindle, c’est donc très révélateur sur la santé globale de l’industrie.

Depuis, le marché des livres électroniques a été rejoint par de nombreux éditeurs comme Georg Von Holtzbrinck, Hachette Livre, HarperCollins Éditeurs, McGraw-Hill Education, Pearson, Penguin Random House, Rakuten Kobo, Simon & Schuster… avec de nombreux concurrents du Kindle comme Samsung, Kobo, Sony, Apple, iReader, Hanvon, Asus, Amazon, Google, xReader, JDRead, BOO, PocketBook, Barnes & Noble, Hanvon, Bookeen, Ectaco, Onyx, Ematic, DistriRead, Aluratek, Tolino.

Voice

Une nouvelle ère s’ouvre avec les assistants vocaux et Amazon est en avance 🙂 Amazon Alexa a ajouté de nouvelles fonctionnalités pour découvrir de nouveaux ebooks. Désormais, les clients peuvent simplement dire “Alexa, que dois-je lire ensuite ?” pour obtenir une recommandation de livre basée sur des livres personnalisés, les plus vendus ou les plus populaires parmi plus de 20 millions de titres audio, Kindle ou imprimés. L’expérience conversationnelle permet aux clients de demander des genres ou des auteurs spécifiques, d’écouter des résumés de livres, d’en apprendre davantage sur les notes, les critiques éditoriales et plus encore.

N’oubliez pas, rien ne sera plus comme avant, il faut apprendre, s’adapter, inventer, le digital est l’une des clés de la solution.

Exemples de digitalisation

Dans l’idée de promouvoir le commerce de proximité, le site de vente en ligne LaLibrairie.com a été créé en 2010. Il permet à 2 500 librairies indépendantes et points libraires de toucher au e-commerce. La plate-forme offre aux lecteurs de récupérer leur livre acheté dans l’une des librairies du réseau. Autre initiative, leslibrairies.fr qui rassemble plus de 250 librairies françaises.

Le phénomène est mondial pour toutes les libraires qui sont confrontées à la pandémie. Par exemple, en Inde, la librairie de Midland a gravement affecté l’entreprise familiale âgée de 47 ans à Delhi. Le fondateur à réfléchi à des moyens innovants de faire fonctionner sa librairie indépendante. Ils ont donc appris à numériser entièrement la librairie et à la commercialiser sur les réseaux sociaux. Le pivot qui est encore en cours montre déjà des résultats. Après avoir eu une présence numérique minimale il y a six mois, la librairie enregistre désormais près de 70% de ses ventes sur Instagram et WhatsApp. Pour assurer un service de bout en bout, la librairie s’est associé à FedEx et Delhivery. Leur site Web entrera en ligne fin décembre, ils ont dû cataloguer 500 000 titres, ce qui a pris du temps. Ils sont également sur le point de créer un club de lecture.

Mais ce que montrent malheureusement ces initiatives, c’est que cette profession s’organise en ordre dispersé. Le SFL  qui représente les librairies indépendantes françaises a une présence très faible sur internet et les réseaux sociaux ! Une plate-forme digitale commune avec des accords de livraison forte (Prime), ainsi que des accords avec certaines plates-formes numériques de lecture de livre doublé à une campagne de communication innovante pourraient changer le jeu ! Mais cela aurait dû démarrer dans les années 2000 🙂

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