Publié le 12 janvier 2012, modifié le 15 décembre 2020.
Par La Rédaction

[Analyse ] Retour sur le lancement de Free mobile

Publié le 12 janvier 2012, modifié le 15 décembre 2020.
Par La Rédaction
Photo : servicesmobiles

Photo : servicesmobiles

Tout a été dit ou presque sur le buzz lié au lancement de Free mobile. La comparaison avec Apple sur la façon de communiquer est intéressante d'autant que l'annonce du détail de l'offre le dernier jour réglementaire était surprenante - une annonce antérieure aurait pu a

L’offre est indéniablement très compétitive non seulement à cause de la strucutre tarifaire plus simple et plus transparente mais évidemment en raison du tarif très agressif de 19,99€ (15,99€ pour les abonnés Free). Il y a certes quelques détails à relever dans les conditions générales de vente, mais objectivement l’offre va faire bouger les lignes et libérer les usages. L’offre Internet mobile est particulièrement attractive avec 3 gigaoctets et l’inclusion de nouveaux usages (peer-to-peer, modem, VoIP…).

Les opérateurs se préparent depuis un an à une offre low-cost très agressive et nul doute qu’ils vont devoir réagir rapidement et de façon plus significative qu’avec les premières offres de type B&You ou Sosh qui avaient tenté de marquer le terrain. Les premières réponses ont été annoncées. Depuis l’épisode de la TVA il y a un an, les prix sont en tendance baissière et la montée des MVNOs (Virgin, La Poste Mobile…) est significative passant enfin la barre des 10%. Répondre uniquement sur le terrain du prix risquerait d’avoir des effets dévastateurs pour les opérateurs en place – comme cela a été le cas en Scandinavie où les opérateurs low-cost étaient montés à plus de 20% de part de marché. Il y avait eu une concentration forte avec finalement un rachat des MVNOs par les opérateurs historiques!

Le marché français semble fonctionner à l’inverse d’autres marchés Européens où la tendance est plutôt à la consolidation et où le taux de croissance des MVNOs marque le pas (à l’exception de l’Italie ou de l’Espagne où les MVNOs ont été lancés plus tardivement) ou s’oriente sur des offres très segmentées ou de niche (MVNOs “communautaires” type Lebara). A l’exception de 3UK lancé en 2003 et de Virgin Mobile UK les nouveaux entrants n’ont pas réussi à obtenir de part de marché significative et rencontrent des difficultés (les autres filiales de Hutchinson en Autriche, Suède et Italie ou encore Yoigo en Espagne). La différence majeure est que contrairement à 3, Free dispose déjà d’une base installée de plusieurs millions de clients et d’une marque forte. Contrairement au marché anglais majoritairement prépayé, le phénomène de SIM-only et de non-subvention du téléphone est relativement récent en France.

Le risque principal à court terme pour les opérateurs en place n’est pas tellement la part de marché que pourrait prendre Free, mais le profil des churners. On a assez souvent répété que Free avait un fort capital de sympathie auprès des geeks et des early adopters (cf le buzz sur les réseaux sociaux). Si les possesseurs de smartphones et les utilisateurs plus appétents aux services mobiles – qui sont aussi les “influenceurs” sur les médias sociaux – quittent Orange, SFR ou Bouygues, il y aura un coût d’opportunité important pour eux. Pour donner un exemple concret, je possède comme tous les observateurs différents forfaits et terminaux, mais à titre personnel paye plus de 45€ par mois pour l’utilisation de mon iPhone…Orange devrait logiquement bénéficier d’un effet d’amortisseur avec l’accord de roaming mais en définitive l’opérateur qui sera le plus impacté est vraisemblablement celui qui a le plus fort taux d’abonnés Free dans sa base installée (logiquement Bouygues Telecom).

Une des différences principales est que contrairement au lancement de Free sur le fixe avec l’offre Freebox et le prix référence de 29,99€, le marché du mobile est déjà un marché de fidélisation et non plus d’acquisition. Cela va impliquer des investissements significatifs sur le service client. Certes, certains consommateurs pourront se satisfaire de la logique principale de Free sur le self-service en ligne et la logique de communauté qui fonctionne bien avec des early adopters (cf l’offre MVNO de giffgaff au UK) qui permet de réduire les coûts, mais cela ne sera probablement pas suffisamment sur un marché saturé habitué à une certaine qualité de service.

Sur le moyen terme, Free va également devoir investir dans son réseau – à la fois cellulaire et de distribution (ouverture d’autres boutiques) et aussi proposer des services innovants. C’est l’une des valeurs de la marque et le potentiel d’innovation est très important avec les services quadruple play, la TV connectée. C’est là où Free va devoir finalement se différencier et c’est ce qui fait de ce lancement une non-surprise. La réponse des opérateurs et des MVNOs dans les semaines qui viennent va donner le ton et démontrer ou non leur agilité. Après tout, ils ont eu le temps de se préparer…

@Thomas_Husson

Lire aussi